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Retranscription texte de la vidéo : Comment sont détectés les potentiels en entreprise ?

Lise Bachmann : bonjour Michel !

Michel Le Boëdec : Bonjour Lise !

Lise Bachmann : je vous présente Michel Le Boëdec, une brillante carrière au sein d’un grand Groupe, ENGIE, dans des postes de chef de cabinet à la présidence du groupe, directeur de business unit ! C’est sur le poste de directeur adjoint à la DRH groupe, en charge du développement des potentiels et des cadres dirigeants que j’attends ton témoignage Michel, aujourd’hui. Alors, parle-nous s’il te plaît du processus de détections de ces potentiels.

Michel Le Boëdec : alors, ce processus, il est varié évidemment selon les entreprises, il n’y a pas quelque chose d’unique dans toutes les organisations. Il y a sans doute deux points qui vont être communs, c’est un référentiel et un processus. Donc un référentiel, tout d’abord qui va être finalement l’ensemble des compétences attendues qui sont identifiées et que l’entreprise veut mettre en avant et qu’elle va rechercher chez ces cadres à potentiel. Et puis de l’autre côté, un processus qui va être organisé en général par les ressources humaines avec les managers et qui va leur donner des clés, des méthodes à travers des entretiens, la plupart du temps, pour détecter et sélectionner les cadres.

Lise Bachmann : Très intéressant. Et l’importance du manager aussi dans ce processus ?

Michel Le Boëdec : oui, le manager il est la clé parce que c’est celui que vous côtoyez au quotidien et qui vous regarde travailler.

Lise Bachmann : est-ce que tu peux me dire au niveau des compétences (plutôt sur les soft-skills, les compétences au-delà de l’opérationnel dans des métiers réussis), ce qui est attendu du futur dirigeant ?

Michel Le Boëdec : alors de la même façon, ça va varier selon les secteurs d’activité et selon les entreprises. Les accents vont être mises sur un point ou un autre, mais je pense qu’on peut retrouver les choses comme l’enthousiasme, la passion…

Lise Bachmann : Merci pour ce témoignage !

Michel Le Boëdec : donc l’importance finalement de rendre visible ce que l’on fait et de savoir le transmettre.

Lise Bachmann : Notamment ?

Michel Le Boëdec : l’empathie, je pense que c’est un point qui n’est peut-être pas aussi intuitif que ça, parce que on peut se dire finalement que ceux qui réussissent sont ceux qui sont durs dans les organisations.

Lise Bachmann : tu as raison, c’est peu intuitif l’empathie comme talent de dirigeant !

Michel Le Boëdec : je suis convaincu exactement de l’inverse, il faut savoir embarquer les équipes et pour ça il faut avoir un minimum d’empathie et pouvoir être un interconnecté, on va dire, avec les personnes.

Lise Bachmann : c’est un peu aussi la capacité à travailler ensemble.

Michel Le Boëdec : …avec les autres, de l’agilité, alors c’est peut-être une “la palissade” parce qu’aujourd’hui, on dit qu’il faut être agile partout et tout le temps, mais c’est quand même une réalité de ce qu’on va attendre des leaders. Et puis enfin une capacité à faire confiance et à dégager de la confiance dans les organisations, à savoir déléguer et à savoir faire travailler des équipes et donner des espaces de liberté à ses collaborateurs.

Lise Bachmann : en effet, on parle beaucoup du rôle de “facilitateur” du manager ou du dirigeant…

Michel Le Boëdec: oui !

Lise Bachmann : c’est quelqu’un qui est comme …le chef d’orchestre.

Michel Le Boëdec : voilà, c’est le chef d’orchestre ! C’est celui qui va faire en sorte que chacun dans l’équipe va donner le meilleur de lui-même, et le résultat c’est le collectif et c’est cette capacité à faire émerger des résultats en équipe.

Lise Bachmann : très intéressant, donc j’espère que ce témoignage nous conforte dans l’idée que la passion et l’enthousiasme sont vraiment aussi le levier numéro 1, puis après les compétences associées. Michel, quel constat as tu pu faire entre la réussite féminine et la réussite masculine dans ces postes de dirigeants ?

Michel Le Boëdec : alors je pense qu’il ne faut pas les opposer et vouloir absolument les distinguer parce que c’est…

Lise Bachmann : non, non ce n’est pas le propos. Juste de savoir s’il y a des traits spécifiques pour chacun ?

Michel Le Boëdec : il y a des points d’attention parce que évidemment quand tu regardes l’histoire des organisations, on ne peut pas dire que les managers à un certain niveau soient très féminins, alors c’est le point de l’histoire, il y a multiples raisons, de multiples critères dans les manières dont les hommes se sont comportés, la manière dont la société s’est comportée à l’égard des femmes, et progressivement, c’est en train de changer, les organisations changent, les hommes et leurs regards changent aussi.

Mais il y a une partie du travail qui relève aussi de ce que les femmes doivent faire donc il y a les prises de conscience, à mon avis, sur plusieurs thèmes, qui sont d’abord l’auto-censure, donc il y a souvent une capacité à ne pas y aller et à se dire finalement, « allons je ne suis pas légitime, je n’ai pas les compétences pour le faire » …

Lise Bachmann : est-ce que je peux, Michel, rajouter cet exemple souvent cité : on dit que pour postuler à un job, un homme estime que s’il  a 60% des compétences pour ce job : il y va. Une femme, si elle n’a pas 99,5% elle ne va pas oser…

Michel Le Boëdec : oui !

Lise Bachmann : est-ce que tu as constaté cela ?

Michel Le Boëdec : oui, oui, on est dans ce registre là donc ça évolue, mais cette évolution, elle va passer par une évolution des femmes elles-mêmes et cette prise de conscience, pour se dire, « il faut que j’aille de l’avant, il faut que je me sente légitime à le faire et que finalement je casse un peu les barrières que je me mets aussi moi-même », il n’y a pas que les barrières que nous les hommes on met tout autour.

Lise Bachmann : oui, bien sûr, c’est vraiment très très riche ton témoignage, merci Michel ! Michel, le processus tu viens de nous le décrire. Concernant les étapes clés, quelles sont-elles pour ce processus d’identification des potentiels ?

Michel Le Boëdec : alors il y a un premier point qui est très important, et qu’il ne faut quand même pas oublier, c’est que pour pouvoir rentrer dans ce processus de détection de potentiel, c’est possible parce qu’on réussit dans son job.

Lise Bachmann : bien sûr !

Michel Le Boëdec : donc il faut quand même avoir des résultats, avoir prouver sur la durée, et c’est possible dans plusieurs missions, qu’on a des résultats et que les choses avancent, c’est quand même la base, c’est une “la palissade”, peut-être de le rappeler. Mais enfin, c’est quand même un point essentiel.

La deuxième chose c’est savoir saisir les opportunités. Finalement, c’est être à l’écoute et à l’afflux des choses qui se présentent, et peut-être aller prendre de temps en temps de certains nombres de risques et aller prendre des postes qui peuvent paraître moins dans la trajectoire ou dans la lignée habituelle mais qui vont être très enrichissants.

Lise Bachmann : Excellent !

Michel Le Boëdec : ensuite, il y a un facteur qu’il ne faut pas négliger, c’est la chance, alors la chance elle se provoque, la chance elle se saisie aussi mais donc c’est aussi la chance des gens que vous allez croiser…

Lise Bachmann : tout à fait !

Michel Le Boëdec : …les personnes qui vont vous aider et certains ou certaines qui vont peut-être devenir votre Mentor parce que c’est un élément qu’il ne faut pas négliger dans ces parcours.

Lise Bachmann : si je peux permettre Michel, j’ai une petite illustration, une DAF au sein d’une entité déjeune avec moi et je lui annonce que le DAF de mon entité est sur le départ. Et quelques semaines plus tard, je la retrouve dans ce poste. Quelle efficacité ! La chance de ce déjeuner, et le passage à l’action pour saisir cette opportunité.

Michel Le Boëdec : et puis enfin, les derniers points sur lesquels je voudrais insister, et c’est parfois difficile à accepter, c’est que finalement toutes les compétences que vous avez développées ou utilisé pour réussir dans le dernier poste ne sont pas nécessairement celles dont vous aurez besoin pour réussir demain.

Vous serez dans un contexte un peu différent où on attendra de nouvelles aptitudes et les postes passés ne vous auront pas nécessairement préparé à développer ces compétences-là.

Lise Bachmann : tu veux dire qu’ils ne garantiront pas la réussite.

Michel Le Boëdec : … il faut aussi savoir se remettre en cause et développer de nouvelles aptitudes en fonction du contexte dans lequel on va évoluer dans le futur job !

Lise Bachmann : d’accord ! Beaucoup de challenges en effet à retenir.

Michel Le Boëdec : beaucoup de challenges mais finalement c’est une course de longue haleine mais avec de nouvelle haie à chaque fois.

Lise Bachmann : c’est ça, très belle illustration ! Et alors, enfin est-ce que tu peux nous raconter les belles réussites féminines, alors pour le coup, est-ce que tu as une illustration à nous donner ?

Michel Le Boëdec : alors je ne vais pas citer de nom… on va rester dans des choses qui sont, voilà, personnels. Mais plutôt une anecdote, chez ENGIE, nous avions lancé un programme de leadership au féminin, et donc j’ai mentoré plusieurs personnes et je me souviens d’un exemple avec l’une d’entre-elle qui un jour arrive, au lobby où nous avions rendez-vous et elle me dit avec un large sourire, « ça y est je l’ai fait, j’ai tenu tête à mon Boss ». Tenu tête, au sens de savoir dire et donner son point de vue, en étant parfois en opposition, mais pouvoir s’exprimer et finalement prendre son territoire.

Lise Bachmann : prendre son territoire, excellent !

Michel Le Boëdec : ça, j’ai trouvé ça tout à fait intéressant et surtout l’expression qui accompagnait son témoignage, qui était…

Lise Bachmann : je l’ai fait !

Michel Le Boëdec: voilà, un sourire totalement radieux et alors je ne sais pas s’il y a eu une relation de cause à effet mais en tout cas cette personne a une carrière qui s’est, derrière, bien déroulée, elle a changé de poste et depuis elle a eu une ascension remarquable.

Lise Bachmann : voilà, tu permets à notre audience de se projeter vers de beaux espaces. Donc les filles, allez-y, les femmes, prenez aussi votre territoire comme le dit Michel, et faites-le en bonne intelligence évidemment avec vos collègues masculins.

Michel, merci beaucoup pour ce témoignage.

Michel Le Boëdec : merci !

Lise Bachmann : et à très bientôt pour un témoignage sur l’importance d’intégrer des réseaux, internes comme externes !

Michel Le Boëdec : merci, bonne journée !